eux
tant sont passés, peu ont pu fuir.
leurs images sont restées, incrustées au plus profond des chairs.
jours de miracles, de folies et d’insouciances, tous ont coulé. passés, consommés comme une route vers les équilibres instables, rythmés par des coups de balanciers. butoirs invisibles dont on rit, seul le jeu existe. point de résultat, point d’enjeu. folie d’une journée, d’une année qui ne résiste pas à l’usure.
j’aime à repenser à ces bâtiments vides et silencieux que tu imaginais pleins d’une foule joyeuse et festive. folie d’un instant née de l’envie et de l’excès.
j’aime à repenser à cette ruelle qui dévoilait ces voilages blancs et une ombre si lumineuse. course effrénée.
j’aime à revive ce tête à tête cachotier et timide autour de goûts cachés, d’envies et de fuites. disparition. à la couleur, aux bleus, aux verts, aux paillettes dorées d’un regard a succédé le noir et blanc. celui de l’absence. ne jamais se résigner, refuser pour mieux survivre au cœur des ruines, de l’impossible, de l’insoutenable réalité.
j’aime à refuser cette vision sans excès, sans saveur ni ombre. entrer de nouveau dans la ronde de quelques couleurs.
fuir sans doute, retrouver des ombres pour émerger à la lumière. aveuglé, je laisse mes yeux s’habituer de nouveaux à ces bleus, ces verts. odeurs et sensations si familières. puissance et calme des pluies de printemps alors que la glace a disparue des caniveaux et que je laisse mes pas éclabousser mes pantalons.
je vous regarde, nos regards se croisent sans que l’on puisse se voir ou s’apercevoir. solitude du pas et cicatrices encore béantes.
expérience d’un univers qui a fini par oublier ces marionnettes. marionnettes qui ont cru exister. bois, porcelaine et fils emmêles, le désordre règne dans le petit théâtre et tout autour de l’atelier.
j’ai entendu les complaintes des collines répondre à la lande, le brouillard de la prairie et le crépitement des ronces sur l’herbe mouillée rompre le silence de l’aube. tant d’images incrustées dans les chairs.
gravir la colline pour mesurer le chemin parcouru et rendre hommage à la générosité, aux oublis, à ces moments, tous ces instants. laisser son regard s’échapper tout autour pour contempler beautés et désastres.
les yeux clos, face aux vents, les cordes vibrent. solitude du grain qui éloigne le passant. trempé, épuisé je ne lâcherai pas, trop d’ombres et de sang. filets rougeâtres emportés par le courant, ce sont vos instants. survivre pour continuer à permettre la mémoire, survivre pour célébrer. l’averse, puis le déluge, le filet s’épaissit.
trempé, épuisé je ne lâcherai pas, trop d’ombres et de sang
je ne suis que la somme de dons absolus.
Lhorens b. Sartori
ambiance : après moi (scratch my back) peter gabriel